Le Studio, Centre Ville de Londres, Angleterre

Lorsque Samuelle se réveille, elle se trouve dans une chambre sombre aux teintes grises bleutées. Un grand lit... très grand, assez pour qu'on puisse y dormir cinq adultes sans jamais y manquer de place. La métisse y est étendue par dessus les draps, vêtue d'un t-shirt blanc juste assez grand et d'un jeans trop court. La température de la pièce est juste parfaite, ni trop chaud, ni trop frais. Une immense fenêtre sur le mur de droite drapée de gris foncé, la décoration est un peu froide, deux ou trois poster de groupes inconnus, un japonais et un allemand.

Quand elle réclame de l'eau, c'est Derick qui surgit avec un verre très gros et un pot a jus transparent plein de jus orange électrique.

- C'est une sorte de Powerade. Ça hydrate.

Lui dit-il en s'assoyant a côté d'elle, lui refilant un grand verre plein et posant la carafe sur la table de nuit. Assis, les jambes étendues devant lui a la place a côté d'elle dans le grand lit, il attend qu'elle termine de boire...

- Ça va mieux ?

Demande t-il ensuite en lui souriant, jetant un coup d'oeil aux bandages et aux diverses crèmes qui ont été étalées sur ses coupures.

Dans un décor aussi austère, les yeux de la métisse rayonne d’une façon tout à fait surnaturelle.

Samuelle a un mal de chien à soulever l’énorme verre pour le porter à sa bouche mais elle ne l’admettrait jamais. Qu’il ose seulement lui proposer de l’aide et il va prendre une douche, c’est certain, quitte à utiliser ses dernières forces et à se passer d’eau! Elle se jette néanmoins sur le verre comme un noyé sur de l’oxygène. « Encore! » ordonne-t-elle en ménageant ses mots, welling pour un deuxième…

« J’ai cru mourir encore une fois… » Sam se rejetta en arrière pour faire l’étoile sur le matelas surdimensionné. « Mince… Ça ne fait pas tout à fait 20ans depuis la dernière fois… J’ai été conviée à une petite réunion de famille… » expliqua-t-elle avec un geste vague de la main… Oui quoi… Les réunions de famille sont particulières chez les Daee. Elle en parle avec sérénité... Son père lui a certainement déjà raconté qu'elle est morte quand elle était plus jeune...

Elle ferma les yeux, se palpant les côtes… « Derick? Soit honnête ok? Lequel de vous deux s’est offert le luxe de me changer de vêtement? » Considération toute féminine…

Il a voulu lui porter un coup de main... Mais s'est ravisé quand il l'a vue mettre autant d'efforts a vouloir le faire elle-même. Il a vite saisi qu'elle refuserait toute aide... C'est pourquoi il a préféré la regarder faire avec un sourire presque moqueur... Du genre: Allez, amuse toi, moi je t'aiderai pas, tu veux pas de toute façon alors j'peux me permettre de rire.

- J’ai cru mourir encore une fois…, le jeune homme l'observe attentivement, évaluant le moment ou elle devra changer ses pansements, Mince… Ça ne fait pas tout à fait 20ans depuis la dernière fois… J’ai été conviée à une petite réunion de famille…
- Ce s'rait bien s'ils te laissaient le temps d'te remettre avant d'te tuer encore.

Fait-il en s'étirant paresseusement, soulagé de la voir aller déjà mieux.

- Ta famille ont l'air d'avoir des valeurs très conviviales. C'est vous qui chassez l'souper ?

Demande t-il avec un sourire dans la voix.

- Derick ?
- Hm ?
- Soit honnête ok ?
- J'vais essayer.
- Lequel de vous deux s’est offert le luxe de me changer de vêtement ?
- Oh, c'est moi. T'as perdu du poids depuis la dernière fois hein ? Tes seins et tes fesses ont rap'tissé.

Dit Derick en piquant un doigt brusque dans les côtes de Samuelle.

- J'préférais pas laisser l'boulot a p'pa... Lui et ton corps hein... On sait jamais c'qui aurait pu arriver...

Ricane le jeune homme en croisant les jambes.

Samuelle piqua un fard terrible. Les pommettes rouges! « Merci… À tout casser, je crois que je préfère effectivement que ce soit toi… » Elle reste couchée sur le dos sans un geste, trop épuisée par sa mésaventure, les yeux clos. « Rappèle-moi de te foutre une raclée plus tard pour le commentaire à propos de mes fesses et mes seins, salaud. » soupira-t-elle calmement.

La métisse se passa la main dans le cou et la ramena devant ses yeux en grimaçant. « C’est quoi cet onguent? Ça pu! »

- Merci… À tout casser, je crois que je préfère effectivement que ce soit toi…
- Ça fait plaisir. J't'ai pas tripotée, mais j'te cacherai pas que j'en ai profité pour me rincer l'oeil.

Fait-il comme si de rien était... Après tout, qui ne rêverait pas de se faire toucher par lui hein ?... Il sait qu'il a une gueule d'ange. C'est dur de le nier quand on s'le fait répéter tous les soirs.

- Rappèle-moi de te foutre une raclée plus tard pour le commentaire à propos de mes fesses et mes seins, salaud.
- Promis.

Dit le jeune homme en posant une main sur son coeur... Elle s'en souviendra pas demain, pense t-il en baissant les yeux pour la regarder toucher son cou.

- C’est quoi cet onguent ? Ça pue !
- Évidement. Tu t'attends à quoi après qu'ce soit Sebastian Shaw qui t'ai soignée ? Il est pas du genre a couvrir les parfums naturels de ses produits pour le plaisir des p'tits nez fins. C'est comme du Buckley, c'est méchant mais ça marche. Tu vois l'genre ?

Réponds Derick en ne se gênant pas pour se ficher le nez dans la paume de la métisse pour sentir... Histoire de voir s'il ne saurait pas ce qu'il y a dedans à l'odeur... Sans oublier de fermement lui tenir le poignet pour qu'elle ne lui étampe pas sa main dans la face.

- Y a d'la racine d'Élébore blanche en tout cas... Une base pour un anti-douleur, y en a dans les philtres de paix. C'est ça la p'tite odeur de mouffette. Quand on la fait bouillir sa senteur devient insupportable. Heureusement qu'elle est diluée sinon tu sentirais le putois à trois milles à la ronde.

Ricane t-il.

- Et tu t'es traînée jusqu'ici dans cet état ? T'étais loin ?

Demande ensuite Derick en posant la main sur quelque chose de poilu, doux et chaud qui viens de venir se coucher sur ses cuisses... Pitouch'... Qui a tous les airs d'un Flaireur maintenant que sa fourrure a poussé. Sa queue est très très longue et on dirait qu'elle a maigri. Ses oreilles semblent avoir pris de l'ampleur, comme si elle avait été déguisée auparavant et que maintenant elle était montrée sous sa vraie forme.

« Pas très loin… » répondit-elle évasivement. Samuelle n’admettra jamais qu’elle s’était trouvée trop faible pour chercher un autre refuge… Elle se roula en boule comme un chat, un gros chat, semblant chercher une position confortable pour sommeiller et prendre ses aises. Les chats sont partout sur leur territoire… Et pourtant c’était là une position curieusement défensive. « Le manteau que j’avais sur le dos… Il est toujours en bon état? » s’informa-t-elle. Sans gêne… Elle n’avait pas dit : mon manteau… Elle avait dit le manteau…

« Alors à quoi vous occupez-vous, toi et ton vieux père? Tu joues les gigolos pendant qu’il teste ses expériences sur lui-même? »

- Pas très loin…

...Ça suffisait pas comme réponse... Mais Derick se dit qu'insister... Qu'insister serait la meilleure manière d'avoir des précisions finalement. Ouvrant la bouche pour poser une question de plus, Samuelle s'étira et le jeune homme ne put qu'admirer la musculature de la métisse roulant sous la peau... Déconcentré par la félinité de sa compagne de lit, il pinça les lèvres...

- Le manteau que j’avais sur le dos… Il est toujours en bon état ?
- Oh. Ouais... Ouais justement, p'pa y jette un oeil j'crois. Sacré morceau ce manteau hein ?

Fit le jeune homme en passant une main distraite sur le dos du Flaireur qui tournait en rond sur le matelas, chassée de son spot par la métisse qui avait prit la place qu'elle occupait. Elle décida plutôt de grimper sur les cuisses de son maître et s'y roula en boule, boudeuse... Si elle avait été un vrai chat, elle aurait probablement foutu le camp... Mais ce n'était pas vraiment le cas.

- Alors à quoi vous occupez-vous, toi et ton vieux père ? Tu joues les gigolos pendant qu’il teste ses expériences sur lui-même ?
- C'est un peu ça, ouais. P'pa s'occupe d'un bar double, danseuses et danseurs, et comme j'ai du temps à perdre, j'me suis trouvé un boulot chez lui à mi-temps... Et... ouais, il continue de tester sa marchandise sur sa propre personne... J'commence à en avoir marre de ses sautes d'humeur et de son tempérament nerveux de toxico... Pire qu'avant..., expliqua t-il en grattouillant les oreilles de Pitouch', ...Mais sinon, qu'est-c'qui t'es arrivé au juste pour que tu t'pointes dans c't'état ? Après tout, on t'as soigné, tu nous doit bien des explications.

Fit-il sur le ton de l'affirmation, pas de la question ni de la supposition.

« SEBASTIAN?? T’as laissé Seb avec le manteau?? ARGL! » Laisser Sebastian seul avec un manteau dont elle n’avait pas elle-même fini de faire l’inventaire de toutes les poches… Oh misère… Samuelle ne l’écoute déjà plus, elle sort du lit! Juste un peu moins vivement que d’habitude parce que ça fait quand même un mal de chien. Puis elle prend la porte.

« J’dois rien du tout, si t’es pas content, la prochaine fois t’auras qu’à me laisser là! »

Demander est la plus sûre façon de ne rien obtenir…

« Sebastian? » appèle-t-elle en faisant irruption dans le studio.

- SEBASTIAN ?? T’as laissé Seb avec le manteau ?? ARGL !
- De quoi ?

Fit Derick en levant la tête de son chat pour poser un regard dubitatif sur Samuelle. Qu'est-ce qui lui prenait à celle-là ? Il avait quoi son manteau à part qu'il pesait trois tonnes et quart ? Se levant, laissant Pitouch' bouler sur le matelas, il se mit en tête d'accompagner la métisse dans les méandres du Studio Shaw-esque...

- J’dois rien du tout, si t’es pas content, la prochaine fois t’auras qu’à me laisser là !

Levant les yeux au ciel, le jeune homme la suivit alors qu'elle fit quelques pas jusqu'à entrer dans le bordel de Sebastian... La chambre avait belle allure comparé au reste...

- Sebastian ?

...Si la Police ou l'Inquisition tombait sur l'endroit, ils auraient bien du plaisir à saisir tout ça. Des plantes partout, magiques ou pas, certaines qui poussaient même sur les pôles à rideaux des grandes fenêtres, d'autres qui trainaient jusque sous les portes, on se serait crus en pleine jungle. Il faisait chaud, humide, le plafond usé, un système d'arrosage maladroitement installé qui coule un peu et qui fuit légèrement à certains endroits, de la terre un peu partout mais pas un seul insecte... heureusement. Il y avait une nette délimitation entre la chambre de Derick et le reste du Studio...

Sebastian, installé en tailleur sur la table de la cuisine... Enfin, ce qui avait l'air de l'être, étudiait justement le contenu des poches du manteau, ouvert, étendu sur la surface de la table, une fiole d'acide à la main, l'examinant attentivement et très précautionneusement, évitant d'y foutre le nez tout de suite... Entendant l'appel de la métisse, il se redressa, remontant dans ses cheveux une paire de lunettes à triple, voir quadruple, peut-être même quintuple lentilles... Il avait quelque chose du scientifique fou, avec ses gants en caoutchouc percés sur certains doigts, très très usés sur d'autres...

Portant un vieux chandail kangourou dont les manches avaient été négligemment coupées, le capuchon à moitié remonté sur la tête et un sweat pant gris, pieds nus, il descendit de son perchoir et rejoint la jeune femme avec un sourire charmant.

- Sam ! Alors ça va mieux ? Demanda t-il sur le ton le plus chaleureux possible avant de changer de sujet tout aussi rapidement, Tu sais, ce vêtement est prodigieux ! Il en a des cachettes ce manteau ! Il est à toi ? Parce qu'il y a des machins vraiment extraordinaires là dedans ! Des fioles d'un acide d'une telle violence ! T'imagines même pas !

S'exclama t-il avec une hystérie toute féminine dans le ton, une cigarette derrière l'oreille et les yeux brumeux... Il était pas sobre... Mais Sebastian n'était jamais sobre... Derick arrivant derrière la métisse, pinça les lèvres...

- C'est le manteau de Coeurd'acier ça...

Fit Derick, beaucoup plus conscient que son père... S'avançant vers le manteau, il en retourna un pan et observa un instant les attaches et quelques détails... Pour qu'elle panique autant parce que des gens farfouillaient dedans, c'était une option envisageable que le vêtement appartienne à l'Inquisiteur... Surtout que quand il l'avait vu plus tôt, il lui avait été tellement familier... Mais il avait préféré éviter de sauter au conclusions.

- Non ?

Demanda t-il alors que Sebastian grimaça, incrédule et plissa les yeux en reposant son regard sur la fiole dans sa main...

« Oui je sais et j’imagine parfaitement… »

Merde… Lui piquer son manteau était une chose, laisser les autres lui faire les poches en était une autre… Halewyn avait ses petits secrets… Elle était l’un d’eux… Et certain de ces secrets la protégeait elle-même… Comme résister à un sortilège de la classe de l’aveda grâce à quelques plaques d’acier…

« C’est pas ce que tu crois! » se défendit-elle en faisant volte-face pour s’adresser au fiston…

Elle retira les fioles des mains de Sebastian comme on enlèverait une pièce de monnaie de la main d’un nourrisson.

« Non en fait, c’est exactement ce que tu crois! »

Samuelle rafla le manteau encore tout tartiné de son sang pour le plier sur son bras : propriétaire. La vache qu’il était lourd! Et dieu qu’elle était faible! La métisse ploya sur une chaise de cuisine, dissimulant sa souffrance. Elle dévisagea son vieil admirateur. « Il est conscient ou c’est purement réflexe? »

- C’est pas ce que tu crois !
- ...Qu'est-c'que j'suis sensé croi-
- Non en fait, c’est exactement ce que tu crois !
- ...Hein ?

Fit Derick en regardant faire Samuelle tandis que Sebastian agita une main maladroitement pour récupérer l'objet qu'on venait de lui arracher.

- Non mais oh !

S'exclama le paternel en posant les poings sur ses hanches... Puis Derick vint rejoindre Samuelle et s'assied sur la table, observant le vêtement plié... La métisse était encore faible et le manteau était drôlement lourd, il s'en était aperçu quand il l'avait laissé à son père et que se dernier s'était pratiquement débâti le dos en le trimbalant jusqu'à la cuisine après avoir rafistolé sommairement la belle Daee.

- Il est conscient ou c’est purement réflexe ?
- ...Un état entre les deux j'dirais.

Fit le jeune homme en tournant les yeux vers son père qui semblait avoir déjà détourné son attention du manteau pour tomber dans une profonde admiration d'une maigre petite tige qui s'enroulait autour du robinet de la cuisinette, parsemée de bourgeons violets qui battaient comme un coeur... Derick grimaça lorsqu'une des pustules éclata entre les doigts de Sebastian et reporta son attention sur Samuelle.

- C'est dans ces moments là qu'il fait ses découvertes les plus tordues... Tu s'rais en état pour aller prendre un chocolat chaud ? Y'a un café 24/24 juste en bas.

Proposa t-il en souriant... Un sourire presque suppliant, puis il jeta un coup d'oeil à Sebastian qui avait décidé de recueillir le jus noir des pustules dans un verre...

« C’est bien le manteau d’Halewyn… je le lui ai piqué pendant qu’il récupérait d’une nuit agitée… » sous-entend-t-elle. Ce n’était pas vraiment un vol… Un emprunt… Elle avait l’intention de le lui rendre… L’intention… à plus ou moins long terme… On s’habituait à son poids… Et il lui avait sauvé la vie… Faudrait nettoyer le sang qu’il n’en relève pas l’odeur… Halewyn pouvait être désespérément protecteur parfois…

Se balader en ville dans un lieu public avec probablement de large vitrine donnant sur la rue dans un périmètre rapproché du site de l’attaque?… Non… Non pas brillant du tout… Depuis combien de temps elle était là? C’est déjà une chance qu’ils ne l’aient pas trouvé. Pourtant Samuelle eut un bon sourire… qqchose de chaleureux où se mélange de l’étonnement de une touche de vanité. « Quelle invitation galante! » Ce n’est pas tous les jours qu’une femme qui approche la cinquantaine se fait inviter à prendre un café par un jeune blanc bec. « Habituellement c’est ton père qui m’invitait à prendre un café… Je n’ai jamais accepté parce que je me suis toujours méfiée de ce qu’il allait glisser dans ma tasse… » Elle jeta un regard appuyé à Sebastian qui faisait ses prélèvements. « Et je crois que j’ai été bien inspirée… » Juste un rappel… Elle avait vécu, elle était morte, elle avait vécu et elle vivrait encore. « Je ne suis pas en état… » Elle n’était pas en état de se lever de la chaise… « Et puis j’ai rien à me mettre… » fit-elle coquettement. « Si t’allais nous chercher deux chocolats chaud en bas? » proposa-t-elle juste avant d’ajouter : « Je te promet d’attendre ton retour pour disparaître… » Un avertissement parce qu’elle en était effectivement bien capable...

- Quelle invitation galante !

Derick leva le menton. Il savait bien que c'était une bonne idée... Et il rêvait de sortir de ce foutu studio qui ressemblait bien plus à une jungle qu'à autre chose...

- Habituellement c’est ton père qui m’invitait à prendre un café… Je n’ai jamais accepté parce que je me suis toujours méfiée de ce qu’il allait glisser dans ma tasse…
- C'est légitime.
- Et je crois que j’ai été bien inspirée…
- Ça, oui...

Fit le jeune homme en posant les yeux sur son père qui faisait glisser entre ses doigts le liquide goudronneux, un sourire amusé aux lèvres, puis il porta ses doigts sous son nez, haussa les sourcils et reprit son échantillonnage... Derick leva les yeux au plafond, un jour il allait s'tuer son vieux père...

- Je ne suis pas en état…
- Han ?

Demanda le jeune Shaw en se retournant vers Samuelle... Comment ça pas en état ? C'était à deux pas !...Enfin... Il comprenait bien ce qu'elle voulait dire. Il n'allait pas insister, après tout, elle était pas encore très bien remise.

- Et puis j’ai rien à me mettre…

Il leva les yeux au plafond avec un soupir d'enfant gâté. L'excuse de fille fatale. Selon ce qu'il connaissait des filles normales, avoir rien à mettre c'était une raison particulièrement plausible pour ne pas sortir... Comme se laver les cheveux ou avoir un gros bouton juste là !...Tss, c'était rabat-joie les filles...

- Si t’allais nous chercher deux chocolats chaud en bas ? Je te promet d’attendre ton retour pour disparaître…
- Délicate attention.

Fit-il avec un sourire en coin, entreprenant de se débroussailler un chemin jusqu'à la sortie... Y avait des trucs qui repoussaient en quelques heures, c'était complètement dingue. Se rendant à ses Converses qui trônaient sur un talus bizarre qui ressemblait à une pile de vêtement couverte de mousse, Derick déblaya le tout et attrapa une veste de cuir qu'il ne prit pas le temps d'analyser et sortit en tirant comme un forcené sur la porte coincée dans les lianes et les vignes... Il se glissa dans le couloir, puis descendit par l'escalier les quatre étages qui le séparaient de la rue et se rendit d'un pas nonchalant jusqu'au café, à tout juste un bloc de là...

Sebastian, à l'intérieur, continuait de traire ses pustules... Puis lorsqu'il eut terminé, il vint s'assoir près de Samuelle, juste ou se trouvait Derick quelques secondes plus tôt avec son verre à moitié rempli de liquide noir... parsemé de petits pépins jaunes, comme sur la surface des fraises, rendant la substance poisseuse plutôt grumeleuse. L'homme l'observa en silence et porta le verre à ses lèvres, avalant une petite gorgée de son contenu avant de pincer les lèvres et de sourire.

- T'es toujours la bienvenue ici, que ce soit le FBI, des Mangemorts ou pire encore qui t'courent après. On a peur de rien nous.

Lui dit-il en faisant tourner le machin dans son verre. Ça aurait presque l'air rassurant si ça venait pas de Sebastian Shaw... En bas, Derick terminait son achat et revenait avec trois grandes tasses de chocolat sur un plateau, une main dans sa poche, il porta une cigarette à ses lèvres, l'alluma discrètement de sa main libre et trottina tranquillement jusqu'au Studio.

pendant ce temps...

Soudainement, la métisse posa la main sur le verre et l’écarta de ses lèvres. Un sourire tendre étirait ses lèvres rose. Muelle laissa tomber le manteau par terre et se rapprocha de son vieil ami, glissant son bras sous le sien pour se soutenir et se rapprocher de lui. Elle posa le verre sur la table, hors d’atteinte et croisa ses longs doigts caramel aux siens. « Merci beaucoup Sebastian… Encore une fois… »

L’or de ses yeux couvait d’une flamme vive. « Tu n’as rien à craindre du FBI, des mangemors, et de tous les autres… » souligna-t-elle en ronronnant. « Rien n’est plus périlleux que m’abriter moi sous ton toit. » Mais Sebastian est un Shaw… Il sait tout ça… « Tu devrais prendre un bain mon ami… te sevrer un peu… Oh pas trop, juste un peu… Reprendre du poil de la bête tu vois… » suggère-t-elle, attentionnée comme une vieille amie très très proche. « T’étais bel homme il n’y a pas si longtemps… » Elle flatte sa vanité en pensant à l’humeur morose de Derick… « Sors de ta chrysalide… »

Lorsque la main de Samuelle se posa sur son verre... Il crut un instant qu'elle en voulait mais lorsqu'elle le déposa plus loin, il eut un froncement de sourcils dubitatif et la laissa s'approcher de lui. Certes il se demandait où elle voulait en venir mais il ne la chasserait pas peu importe ce qu'elle voulait. Il avait si peu de contacts humains, lui qui passait tellement de temps dans ses petites affaires, il avait beau gérer un bar de danseurs et danseuses, il bossait, il prenait pas du bon temps...

- Merci beaucoup Sebastian… Encore une fois…
- Bah ça fait toujours plaisir ma délicieuse amie !

Fit-il en sentant les doigts de la métisse se croiser aux siens.

- Tu n’as rien à craindre du FBI, des mangemors, et de tous les autres…Rien n’est plus périlleux que m’abriter moi sous ton toit.

Sebastian ne préféra rien dire. Samuelle était une Daee... Une Inquisitrice. Un être dangereux. Il le savait. En était parfaitement prévenu. Mais Sebastian n'était pas un inconscient ni un héros courageux. Il était ce qu'il était. Un fou. Mais un autre type de fou. Pas le fou amoureux. Le fou... Tout simplement fou. Sans innocence ni tabou. Simplement un fou braque qui n'avait peur de rien, qui ne tenait à rien d'autre qu'à ses expériences, ses tentatives, ses découvertes pour la... "science"...

- Tu devrais prendre un bain mon ami… te sevrer un peu… Oh pas trop, juste un peu… Reprendre du poil de la bête tu vois…

Il était un peu ailleurs. Il avait l'esprit dans la brume et en ce moment, son état passait loin derrière celui de Samuelle...

- C'est toi qui a besoin de reprendre du poil de la bête ma toute belle. T'es encore blessée...

Tenta t-il de l'interrompre en réalisant le ton qu'elle avait emprunté. Il n'avait pas souvent entendu ce ton là. Une amie... Tout le monde avait besoin d'une amie. Sebastian avait eu des complices, des clients, des patrons, des associés, des "mamans" et une épouse... Mais une amie qui utilisait ce ton là... Ben c'était nouveau. Et ça demandait rien de précis... Pas de "Si t'arrêtes pas, j'te quitte" ni de "C'est mauvais pour ta santé, tu vas finir par te tuer."... Ça n'avait rien à voir avec les discours santé de tous et chacun.

- T’étais bel homme il n’y a pas si longtemps…

Quoi, il l'était plus ?

- Sors de ta chrysalide…

Il pinça les lèvres en silence et elles s'étirèrent dans un sourire un peu triste, laissant apparaitre aux coins de ses yeux des pattes d'oies creusées par la fatigue, l'âge et les sourires dans ce genre. Il comprenait... Mais cette addiction était tellement vieille. Il pourrait faire un petit effort... Pour Sam... Derick rentra derrière eux avec son plateau de verres, jeta un coup d'oeil rapide au couple et eut le même sourire que son père. Un sourire hésitant entre la tristesse, la déception et celui qu'on fait au curé qui vous donne l'hostie... Une sorte de "merci" sans mots. Il retira ses chaussures habilement et posa le plateau de chocolats sur la table.

- J'te disais que c'était pas loin !

Claironna t-il en essayant de changer l'ambiance tandis que Sebastian se retourna pour prendre un des verres en styromousse et le tendre à la métisse.

- Le chocolat ça soigne tout.
- Ça change légalement les idées en tout cas.

Fit Derick en prenant le sien, essayant d'éviter d'employer un ton accusateur mais qui sonnait quand même comme un reproche... Le paternel ignora le commentaire et se pencha pour soulever le manteau et le poser sur la table, entre son verre de liquide noir et le plateau à chocolat.

- Le gars qui va dans le manteau... Il ...va bien ?

Demanda Sebastian en s'étirant pour attraper son grand verre de réconfort sucré, aussitôt tendu par son fils pour lui éviter de se déboiter le dos en s'étirant... C'est bien connu qu'on vieillit drôlement vite quand on abuse... et Sebastian devait avoir l'intérieur aussi usé qu'un gars de 97 ans...

« Pas du tout! » déclara-t-elle en goûtant son verre. « Il a une fée de tatouée sur la poitrine, juste là! » fit-elle en tirant sur le col de son tshirt pour montrer l’emplacement sur sa propre poitrine. « Rose! La vie est très très dure avec lui, je le crains… » se moqua-t-elle.

Le sourire qu’elle dissimula alors sous le rebord de son verre en disait long sur l’origine des malheurs du réputé assassin. Samuelle Daee était une femme véritablement redoutable. « T’as du sucre? » demanda-t-elle. Et attrapant Sebastian juste à temps pour le clouer à son siège, elle ajouta : « Non! Derick va m’en trouver, reste là, tu me tiens chaud! Et c’est réconfortant. » Méfiante vis à vis ce que Sebastian pourrait lui refiler, elle échangea un regard de connivence avec le fils. Jamais l’homme n’avait eut plus belle occasion de peloter la belle métisse.

- Pas du tout !

Derick et Sebastian échangèrent un regard...

- Il a une fée de tatouée sur la poitrine, juste là !

Le plus jeune des deux eut un sourire... Une fée...? Qu'est-ce qu'il foutait avec une fée ? C'était certain que si c'était volontaire, il allait pas bien du tout. Sebastian se contenta de continuer d'écouter en silence...

- Rose ! La vie est très très dure avec lui, je le crains…

Sebastian ricana. Un homme comme Coeurd'acier affligé d'un pareil dessin, ça avait quelque chose de cocasse... Ça perdait un tantinet de crédibilité une fois torse nu. Ah merde, maintenant la prochaine fois qu'il le verrait, il n'aurait en tête que cette créature gravée dans la peau de l'assassin... Enfin, ça c'était si son amnésie partielle du a l'abus de substances ne décidait pas de lui faire oublier ce détail...

- T’as du sucre ?

Obéissant comme le bon toutou qu'il est parfois, Sebastian s'écarta délicatement de la belle métisse qui le retint.

- Non ! Derick va m’en trouver, reste là, tu me tiens chaud ! Et c’est réconfortant.

Le paternel s'immobilisa et sourit doucement. C'était rare qu'on lui faisait un câlin... Il décida donc plutôt de profiter du moment et d'éviter de contredire Samuelle. Dans l'état dans lequel elle était plus tôt cette nuit là, il aurait fait tout ce qu'elle demandait si ça pouvait l'aider à aller mieux... Le jeune homme comprit immédiatement le coup d'oeil lancé par la métisse et il n'y réagit pas mais se dirigea malgré tout vers les armoires, chassant sommairement les petites racines qui commençaient à se frayer un chemin entre les panneaux et les gonds...

- Du sucre dans un chocolat chaud ?

Demanda Derick en grimpant sur le comptoir pour fouiller le haut des armoires... Ce qui était comestible était installé le plus haut possible dans les étagères pour éviter que des plantes n'y poussent ou ne s'y faufilent... Il posa finalement la main sur ce qui ressemblait à un pot à tabac, l'ouvrit et grimaça, puis le remit à sa place avant d'attraper ensuite un sac usé ou il était écrit "Flour"...Il n'osa pas trop l'ouvrir d'après la poudre jaunâtre qui s'échappa d'un coin du sac, puis atteint finalement le fond du cabinet et en sortit un petit pot rempli de sachets de sucre style restaurant.

- Ah ! Voilà.

Fit le jeune homme en descendant de son perchoir avec le pot transparent en main... Sebastian resta sagement immobile, ne tendant même pas la main vers son verre de machin noir dégueulasse qui trainait, hors de portée, certes, mais pas hors d'atteinte s'il se décidait vraiment...

- Y a quelque chose qu'on peut faire pour t'aider ?

Demanda Derick en tendant le pot ouvert à Samuelle.

« Oui, du sucre… » Elle en déchira 4 sachets dans son gobelet. « Les anglais mettent plus de cacao que de sucre dans leur chocolat chaud… Et moi je suis canadienne… » Elle fit tournoyer le breuvage énergiquement. « Puis j’ai besoin d’énergie… »

Samuelle n’admettait pas facilement qu’elle avait besoin d’aide… Une certaine personne avait du retourner une faveur contre elle pour avoir ce privilège. Aussi réfléchit-elle longuement… Le manteau aurait besoin d’être nettoyé. Elle avait besoin d’un bon souper. Elle avait perdu son oncle, ses gamins et son chat… Pas son chat, le père de ses enfants, se rappela-t-elle. En outre elle devait passer voir comment allait Léandre, faire quelques recommandation à Walt et se rapporter au bureau de l’inquisition. Elle frissonna contre Sebastian.

« J'peux dormir dans ton lit ce soir? » demanda-t-elle ingénument en étouffant un bâillement.

- Oui, du sucre… Les anglais mettent plus de cacao que de sucre dans leur chocolat chaud… Et moi je suis canadienne… Puis j’ai besoin d’énergie…
- Ah ouais... En effet.

Fit Derick en s'assoyant à l'autre coin de la table... Sebastian sentit frissonner contre elle la métisse et se dit qu'elle avait encore besoin de beaucoup de repos... Elle était pas prête à repartir tout de suite. L'énergie qu'elle allait prendre allait lui servir à reprendre des forces mais ne devrait servir qu'à ça... Pas à autre chose. Seulement, le père et le fils savaient très très bien qu'elle n'attendrait pas d'être remise pour s'en aller... C'est pourquoi d'un commun accord mais sans le savoir, ils allaient veiller à lui offrir tout ce qu'ils pouvaient pour la tenir en place aussi longtemps que possible... Qu'elle prenne ses aises et peut-être, oublie pendant un moment ce qu'elle avait d'urgent à faire...

- J'peux dormir dans ton lit ce soir ?

D'une même voix, Sebastian et Derick répondirent ;

- Bien sûr !
- Bien sûr !

...Ils échangèrent un regard et le jeune homme reprit avant son père.

- ...Ben, ça dépends si t'as envie de dormir dans une décharge municipale ou pas.

Fit Derick sur un ton mi figue mi raisin, essayant d'avoir l'air de le dire à la blague... Mais Sebastian eut un simple sourire tout à fait innocent et vide de malice... Comme s'il n'avait pas saisi que c'était plus un reproche qu'une blague...

- Carrément ! Allez en paix... J'peux garder le manteau jusqu'à demain matin ?

Demanda le paternel en prenant le vêtement par terre et le posant sur la table tandis que Derick se levait avec son verre pour se rendre derrière son père qui tanguait bizarrement alors qu'il était penché sur le vêtement... Probablement le liquide noir qui commençait à faire effet... Les yeux de Sebastian étaient noirs... La pupille pratiquement entièrement dilatée.

- J'le briserai pas, promis !

Fit-il en ouvrant une poche ou il y avait des fléchettes... Un vrai joujou ce manteau pour un homme... Enfin... Oui, un semblant d'homme comme Sebastian.

Quelque aprt, dans une de spoches, le cellulaire flambant neuf de Hale sonne.

Ou plutôt vibre, mais on sait qu'un appareil sur une surface dure ca fait des vibrations de l'enfer .

« Seb, ce n’est pas pour le manteau que je m’inquiète, c’est pour ce que le contenu de ses poches pourraient te faire… Je ne suis pas convaincue qu’elles ne sont pas piégée… » Elle ne pouvait pas décemment autoriser qqn à faire les poches de Coeurd’acier… Ses geste suggérait quelle manipulait un de ces objets dont la chute est prétexte à des répliques du genre de : Et à l’endroit où s’étend le cratère se dressait jadis la ville de Londre. Sauf que Sebastian avait d’avantage le profil d’une victime que d’un ennemi potentiel. « Par contre si tu avais le temps de le nettoyer un peu… J’ai pas envie que ce soit lui qu’il le fasse... » Une répugnance toute naturelle vis à vis un assassin mais au-delà de tout ça, c’est de sa magie du sang dont elle se méfie.

Samuelle avait besoin de réviser ses allégeances. Le problème lorsqu’on reste toujours au plus près de l’ennemi, en particulier quand on lui confie ses enfants et qu’on devient la marraine des siens, c’est que l’ennemi se transforme peu à peu en ami. Sauf que Samuelle n’avait jamais été l’amie de personne. Pas depuis Harkaitz… Tout était plus simple avant; quand elle ne pouvait faire confiance à personne et n’avait qu’à mentir à ceux qu’elle aimait le plus…

Elle évalua ouvertement le jeune homme du regard. « Sebastian? » fit-elle au terme d’une longue réflexion. « Tu me prêterais Derick pour quelques jours? Oh pas tout de suite mais… Dans un futur rapproché, disons… Demain »

La métisse,le manteau dans les bras, eut soudainement l'air interloquée. Elle fouilla et trouva un cellulaire... Elle ne prit pas la peine de voir qui appelait et se contenta de répondre.

« Quoi? »

La politesse incarnée...

Elle reconnait la voix glaciale d'une secrétaire de l'Inquisition. Celle au surnom de Snow white, mais qui a la languie aussi acérée que la Reine des Glaces.

Monsieur Halewyn Coeurd'Acier je vous prie... C'est urgent.

« Il est pas disponible dans l’immédiat… » répondit une voix au slang tout canadien. Froissement de cuir… « C’est Snow white? Ah! Salut! C’est Samuelle. Qu’est-ce qui se passe? » demande-t-elle avec naturel. Parce qu’ils ont l’habitude de s’adresser à l’un pour se faire répondre par l’autre de toute manière. Partenaire. Techniquement Samuelle est en congé sans solde indéterminé mais ils sont un couple, non? Alors il n’y a rien de saugrenu dans cette situation…

La dite Snow White a un instant d'hésitation, mais son supérieur lui fait signe d'enchainer.

La voix glaciale reprend.

De toute facon vous étiez dans ma liste. Donc vous savez que Nigel Shaw est mort, il y a une réunion en urgence demain pour déterminer qui le remplacera. Il est fortement suggéré à votre...

Ici, une pique sarcastique est retenue de justesse. Elle est professionnelle Snow White. Et le charisme sombre de Hale fait qu'il fait peur, certe, mais il y en a qui trouvent cela... Stimulant. Du genre où pouvons nous pousser les limites sans perdre un morceau.

conjoint et vous de vous présenter. 10 heures dans la grande salle de réunion. Dois je tenir pour acquis que vous lui ferez le message quand il sera disponible?

Parce que D, Daee, c’est après C, Coeurd’acier. La métisse blanchit violemment.« Nigel est mort… Ow… » Pour la seconde fois en moins de 24h, Samuelle a un malaise. Elle se reprit en une fraction de seconde. « Fortement suggéré hein… Passez-moi Turner… » commanda-t-elle.

« Turner? Sam… Oui et bien vous devriez la renvoyer… Oui… Alors qu’est-ce qu’on fait? … Plan B? … Parfaitement! … Non je n’ai pas mes pierres… Je ne sais pas, annoncez-le dans les journaux, ça lui fera une belle surprise… » Les lèvres roses de Samuelle s’étirèrent en un large sourire. « Oh mais je l’aurai bien mérité… Ne tardez pas! »

Elle referma le cellulaire et dévisagea Sebastian et Derick tour à tour... « Nigel est mort ... »